Entretien avec Jack Bon, chanteur, guitariste et membre fondateur de Ganafoul, réalisé par Marie-France Boucly lors du Raismesfest 2023
Formé en 1974, Ganafoul, connut plusieurs vies et plusieurs formations avant d’enregistrer des albums et de connaître un vrai succès populaire en parcourant sans relâche les routes de l’hexagone. Leur blues rock, très inspiré de Johnny Winter, Lynyrd Skynyrd et des Stones, enflammait les scènes. Pourtant, malgré un vrai retour du public, Ganafoul fut assez ignoré des médias parisiens.
Jack Bon était le leader, le guitariste et le chanteur du groupe. Il a accepté de se livrer au sujet de sa carrière avec Ganafoul jusqu’au retour avec ce nouveau line up. Aujourd’hui Ganafoul s’est reformé, et se retrouve sur la scène du Raismesfest !
Bonjour Jack et merci d’accorder un peu de ton temps pour répondre aux questions d’Underground Investigation.
– Après l’arrêt de Ganafoul en 1982, et plusieurs reformations ponctuelles, vous revoilà sur la scène du Raismesfest en 2023. Qu’est-ce qui a motivé ce retour ?
En 2020, Christophe Simplex a décidé de monter le label Simplex Records afin de sortir des enregistrements inédits de groupes lyonnais. Il se trouve que notre sonorisateur de l’époque avait des bandes datant de 1975, bien avant que l’on enregistre « Saturday Night ». Et miraculeusement, les bandes étaient encore exploitables plus de 40 ans après ! Nous avons trouvé sympa de pouvoir ainsi replonger dans cette période, avant même les débuts du groupe. Puis on nous a proposé de jouer, d’autant que nous étions toujours restés amis avec Yves Rotacher. L’occasion était trop belle et on a foncé !
– Quel est le line up actuel, et reste t’il des membres fondateurs ?
Il y a Yves Rotacher, moi et Doudou (Edouard Gonzales), qui était déjà là avant même que l’on soit en trio, dans une formation à 5
– Vous avez sorti 5 albums entre 1977 et 1981. Quel est celui qui t’a le plus marqué et pourquoi ?
Rires ! Je pourrais te parler de celui que je n’aime pas du tout !! Mais celui qui nous a le plus marqué est l’album « Full Speed Ahead ». Le premier, c’est un machin qui a été fait en 9 jours, mixage compris, sans aucune expérience. ça s’est bien passé car le groupe avait le feeling ! Pour le second, nous étions davantage rodés en ayant déjà pas mal tourné, et puis beaucoup de gens l’aiment ! On va dire celui là, mais en fait, chaque album représente une époque, une tranche de vie.
– Comment définirais-tu le style de Ganafoul ?
Au début, on disait que Ganafoul était un groupe de Hard Rock, mais nous étions plutôt dans la tendance de ce que faisait Johnny Winter par exemple. C’est du Blues, mais hyper speedé ! Les groupes anglais font partie de nos influences, mais pour nous, le groupe français de référence reste les Variations. Nous voulions être les Variations !
– Y a t’il des rééditions de prévues, avec la sortie de titres inédits et dans quels formats ?
En 2022, Le label Bad Reputation a réédité en cd une édition remasterisée du deuxième album « Full Speed Ahead », avec plusieurs inédits live. Il est également prévu la réédition du premier album « Saturday Night », et de « Route 77 » ainsi que deux autres live. Il y a également l’album « Roll On », sur lequel nous avons réinterprétés nos titres, avec l’ajout d’un second guitariste, ce qui enrichi les compositions.
– Quelles sont tes principales influences musicales ?
A la base, j’ai surtout été intéressé par le Blues, je j’ai découvert grâce aux disques des Rolling Stones, Muddy Waters, Chuck Berry. Après c’est aussi la musique de la fin des années 60, début des 70’s, avec l’interprétation du Blues dont sont issues les bases du Hard Rock, avec d’excellents guitaristes comme Rory Gallagher.
– Ganafoul est avant tout un groupe de scène. As-tu 1 ou 2 concerts qui resteront à jamais gravés dans ta mémoire ?
Il y a ce concert mémorable en 1978, au Théâtre de Fourvières à Lyon qui s’intitulait « New Wave French Connection ». Il y avait Téléphone, Bijou, Little Bob, Ganafoul, les anglais Dave Edmunds et Nick Lowe… J’ai kiffé ces groupes là ! Ces mecs étaient le dictionnaire du Rock n’Roll ! ça a été un grand moment, car on avait bien cartonné.
J’ai aussi un bon souvenir d’un concert au théâtre antique d’Orange, où l’on jouait sur la même affiche que Dr Feelgood et Elvis Costello. Il y a dans ce lieu historique un gradin très abrupt, et quand tu arrives sur scène, tu es face à un mur de 4 000 personnes ! Il s’y dégage une énergie incroyable et des vibrations dingues ! Je pense que l’on avait bien joué aussi ce jour là !
– Roberto Piazza va être très important pour la carrière de Ganafoul, peux-tu nous parler de cette rencontre et de ce qu’il a apporté au groupe ?
En France il y avait ces gars du Havre de Little Bob Story, qui nous branchaient bien, surtout qu’à cet époque là, dans les années 1974/75, le Jazz Rock et la musique progressive prenait de l’ampleur, avec Pink Floyd en fer de lance, mais ça n’était pas ma tasse de thé. Lors d’une virée en Angleterre avec JeanYves Astier, le bassiste, nous sommes allés voir Little Bob Story dans un pub londonien. On s’est présentés : « Nous sommes français, on aime bien le Rock n’Roll, on joue dans un petit groupe… »
Quelques mois plus tard, nous faisions leur première partie à Lyon, salle de « La Cigale ». Le feeling est bien passé et Bob nous a branché avec le label Crypto. S’en est suivi l’enregistrement de «Saturday night» en 1977, puis une tournée d’un mois en première partie de Little Bob Story. Nous avons appris beaucoup de choses grâce à lui, en le regardant. Bob c’est notre parrain ! Je me souviens d’une discussion avec lui lors de cette tournée… Sans être prétentieux, je savais que notre groupe n’était pas mauvais, mais nous n’arrivions pas à déclencher le public. Et Bob nous dit : « Mais vous êtes tous dans votre coin, vous ne bougez pas… » Après on a compris en voyant Bob sur scène ! Eh bien le lendemain, je crois que c’était à Épinal, on a bougé, et on a eu notre premier rappel ! Voilà l’exemple d’un bon conseil !
– Si tu devais vivre sur une ile déserte, quels seraient les 3 albums que tu prendrais ?
Je prendrai un vieux disque de Blues des années 30, parce c’est là dessus que je joue souvent à la guitare acoustique. C’est une période où les mecs jouaient vraiment de manière conventionnelle. Après je dirais Mississippi John Hurt. C’est un gars qui pratiquais un style de Blues bien foutu, très cool, en arpèges. C’est la base des balades américaines. Dylan s’est servi de ce genre de truc à fond la caisse. Pour le 3ème, une compilation d’Hendrix, mais il y a plein d’autres choses !
– Je te laisse le mot de la fin pour les lecteurs d’Underground Investigation
Ben écoutez, si Ganafoul joue dans votre coin, passez nous voir !
Interview : Marie-France BOUCLY
Photos : Alain BOUCLY